Michel Cornu – Gravure, Dessin
Michel Cornu
« La ligne est un fil que je déroule dans mes dessins. Avec le temps elle s’est diluée à travers l’encre et a amené ces masses de couleur et de matière qui ont pris toute la place »
Dans ce passage de la ligne à l’encre, Michel Cornu propose une imprégnation de matière et de médiums. Pastel en encre de Chine s’épanouissent à la surface du papier Arches ou sur la finesse évanescente du papier Japon. Ils jouent de leurs forces respectives pour se sublimer mutuellement.
Michel Cornu se pose en maitre de cérémonie et orchestre cette subtile valse artistique et technique. Car il est bien question ici, d’une maîtrise technique au service d’une créativité plastique. « L’encre se diffuse, mais j’en reste le maître. Si je ne dirigeais pas, les feuilles de papier Japon qui ne font que 20g, 30g ou 40g seraient totalement noires après avoir été imprégnées d’eau. » Michel Cornu
Mais l’artiste veille et provoque l’émergence des lignes et l’apparition des fentes qui nous renvoient aux origines du monde. Si la référence à Courbet s’impose, elle en offre une variation abstraite et s’enrichit d’une visée métaphorique sur l’évolution de l’humanité. Car Michel Cornu utilise dans ces créations de l’encre et du papier, qui, dans ce qu’ils ont d’ancestral, renvoient à l’éducation, aux marqueurs historiques, à la pérennisation des souvenirs, à la transmission…
Chez Michel Cornu, le sujet est là, en filigrane ou en transparence. « Le sujet est un élément déclencheur qui me permet de démarrer une page blanche. Ensuite je m’envole ailleurs, vers l’abstraction » Michel Cornu
Des indices imperceptibles, des traces évanescentes nous renvoient à ce qui a été. A ce sentiment d’isolement, de solitude que Michel Cornu dénonçait dans ses œuvres antérieures. « Mes personnages se sont dilués dans l’eau, ils se sont évaporés mais il reste quelques signes. C’est un peu comme une fin de vie, quand les cendres sont dispersées dans l’eau d’une rivière. » Michel Cornu
S’en dégage un romantisme énigmatique, d’une rare intensité, à la fois étrange et mélancolique.
Aujourd’hui son œuvre n’est ni revendicatrice, ni politique mais avant tout émotionnelle. L’artiste confie que lorsqu’il crée il doit ressentir une émotion le transcender. Elle guide sa créativité et accompagne son geste.
Cette émotion évolue, se transforme en imprégnant l’imaginaire et les souvenirs du spectateur. Il peut alors voyager au-delà du réel, dans cet univers plastique. Être en apesanteur dans cette galaxie peuplée de météorites, ou se perdre dans les profondeurs d’un gouffre abyssal. Valser et s’étourdir de ces courbes.
Michel Cornu offre l’itinéraire d’un voyage spatial, à la découverte d’un autre monde. Un monde onirique, poétique, d’une rare profondeur qui nous amène au plus profond de nos évasions célestes ou de nos profondeurs intimes. Par-delà le réel, au-delà du visible.
Mélomane, Michel Cornu a besoin de la musique pour créer. Les sons mélodieux d’Arvo Pärt se sont diffusés dans son atelier lors de la création des œuvres de cette exposition. Il y a un lien profond entre sa sélection musicale et les œuvres qu’il crée. Les notes de musique ont imprégné l’atmosphère de son atelier de calme et de douceur que l’on retrouve dans ses œuvres. Mais Michel Cornu va plus loin et transforme cette musicalité en silence pour donner à ses dessins un côté ténébreux. L’évaporation de l’encre qui prend possession de la blancheur du papier et se dilue au-delà des limites de l’œuvre pour sortir du dessin et se prolonger dans des ténèbres spirituelles, suit la trajectoire des notes de musique qui virevoltent dans l’air pour se perdre dans l’infini…
- né en 1957
- Origine: France
- Art: Peinture, Gravure, Dessin